Le phénomène Castor - 3/3

Plan du terrain, disposition des pavillons jumelés et du lotissement voisin privé

L'expérience des Castors d'Orly s'est inspirée de la première aventure de Pessac. Cinq jeunes hommes se réunissent et proposent une première réunion publique le 5 mai 1951 sous le nom « Le Comité du Logement d'Orly (formule castor) ».

 

Ils créent l'association loi 1901 « Les Castors d'Orly » le 27 janvier 1952. Commence alors la recherche d'un site pour construire(...)

« Notre fraternité a été scellée par le béton »

Pierre

Après quelques déceptions, l'assemblée finit par voter l'achat d'un terrain à Ablon le 1er mars 1953. Pour l'obtention d'un prêt par le Crédit Foncier de France, les Castors d'Orly doivent dissoudre l'association. Ils créent la société coopérative à capital variable « Mon Logis, Les Castors d'Ablon » le 2 avril 1953 et acquièrent le terrain en juillet 1953. Le statut de propriétaire est assumé collectivement par la société coopérative jusqu'à sa dissolution en avril 1963. 18 Castors s'engagent dans l'aventure.

Le 10 octobre 1953 sera la première journée de travail collectif. Le voisinage est hostile depuis le début à cette initiative. Les habitants du lotissement mitoyen récemment sorti de terre, craignent ces nouveaux arrivants peu orthodoxes. Ils s'opposeront fortement à l'acquisition du terrain, comme à la délivrance du permis de construire et plus tard au raccordement de la cité Castor à leur hameau par une voie de circulation.

L'hiver 1953-54 est dédié au défrichage du terrain et les pavillons sont attribués dès le début du chantier. Le terrain à forte pente et argileux contraint les habitations à de profondes fondations. La cité proposée par l'architecte du groupe est un ensemble de 18 pavillons - des 4 pièces de 68m2 et des 5 pièces de 81m2 - jumelés deux à deux suivant 4 modèles. Le permis de construire n'est obtenu qu'en juin 1954, après plus de 7 mois de chantier...

Afin d'organiser le temps de présence sur le chantier, un règlement intérieur est établi. Il détaille notamment l'apport-travail : « chaque Castor doit fournir 40h de travail par mois et 120h pendant les congés payés – soit 600h par an ». En cas d'abandon, les Castors ne sont dédommagés de rien. Pour coordonner les Castors et maintenir le lien entre tous, une circulaire d'informations est publiée mensuellement. Des plannings, un contrôle de l'activité de chacun et une rigueur financière permettent de tenir le chantier jusqu'à son terme.

La première famille emménage en juillet 1956 avec l'eau courante dans tous les pavillons et le raccordement de la cité à la route principale en novembre 1956. Les travaux sont encore inachevés en 1957 quand toutes les familles sont dans leur logement : les voies d'accès sont en chantier (boue, monticules de terre...) et les jardins non clôturés. Le groupe se démobilise et perd sa cohésion d'autant plus que la fatigue accumulée pendant toutes ces années se fait sentir. La création d'un syndicat de copropriétaires en 1958 renforcera les liens.

Au dire de tous les Castors du groupe d'Orly, ils ont bâti un quartier solidaire où l'entraide et la complicité sont exceptionnelles. Leur premier Noël est fêté collectivement, organisé dans un garage, et le 14 juillet qu'ils célèbrent annuellement dans leur rue principale est connu de l'ensemble du village. Cette aventure entraînera de multiples répercussions citoyennes : des Castors candidats et élus municipaux, leur engagement dans des associations... L'esprit de ces quartiers est aujourd'hui perdu, les générations suivantes n'ayant pu le perdurer. Ce sont pour l'oeil du badaud, des quartiers ordinaires.

 

Sources :

  • VILANDRAU Maurice, L'étonnante aventure des castors, l'autoconstruction dans les années 50, Editeur Paris Budapest Torino, L'Harmattan, 2002.

  • LES INOUBLIS, La formidable histoire des « maisons castors », Editeur Calais Les Inoublis, 2007.

  • GUIAVARC'H Yohann, Construire sa maison en commun, l'aventure des Castors du Finistère, Edition Skol Kreigh, Morlaix, 2012.

  • La cité des abeilles, documentaire de 50 min réalisé par Marion BOE, 2008
  • Les Castors de la Loire : Claire Cité

 

Pour aller plus loin :

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Extrait d'un travail de thèse réalisé entre 2004 et 2008 à l'Université de Pau et des Pays de l'Adour
Les Castors en Aquitaine-J. BOUSTINGORRY
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